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Le soleil du matin doucement chauffe et dore Les seigles et les blés tout humides encore, Et l’azur a gardé sa fraîcheur de la nuit. L’on sort sans autre but que de sortir ; on suit, Le long de la rivière aux vagues herbes jaunes, Un chemin de gazon que bordent de vieux aunes. L’air est vif. Par moment un oiseau vole avec Quelque fruit de la haie ou quelque paille au bec, Et son reflet dans l’eau survit à son passage
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Ce bon vieux pont de Tournon En a déjà bien vu de l'eau Passer verte avec du galop Ou du rampement dans sa marche. Il connaît le pas, la démarche De l'errant qui porte un ballot, Du petit berger tout pâlot Et du mendiant patriarche. Au creux de ce profond pays, Entre ces grands bois recueillis Où l'ombre humide a son royaume, Le jour, à peine est-il réel !... Le soir, sous l'oeil rouge du ciel, Il devient tout à fait fantôme.
La biche brame au clair de lune Et pleure à se fondre les yeux : Son petit faon délicieux A disparu dans la nuit brune. Pour raconter son infortune A la forêt de ses aïeux, La biche brame au clair de lune Et pleure à se fondre les yeux. Mais aucune réponse, aucune, A ses longs appels anxieux ! Et le cou tendu vers les cieux, Folle d'amour et de rancune, La biche brame au clair de lune.